• Voici un extrait des propos tenus par Bernard Stiegler sur France Culture (Emissions Sciences et conscience) le jeudi 26 octobre 2006:

    "Le populisme industriel, c'est lorsque nous produisons des individus qui ne fonctionnent plus que comme des limaces. (...) Qu'avons-nous en commun avec les limaces ? Beaucoup de choses. Nous sommes de êtres vivants, nous nous reproduisons, nous avons besoin de manger, d'oxygène etc. Nous avons en commun avec la limace, ce qui n'est pas le cas avec le tournesol par exemple, un système nerveux. Nous avons un cerveau, des neurones...la limace aussi ! Nous pouvons parfaitement redevenir des limaces. C'est le conditionnement (...) qui permet par exemple de nous faire nous comporter comme des animaux dans des comportements de foules mimétiques, grégaires. Et donc jamais il n'est acquis que nous nous comportons humainement (...)

    Aujourd'hui la tentation est de soumettre le monde entier, toutes les consciences, d'en détruire le caractère conscientiel, c'est-à-dire ce qui permet à chacun de nous d'être une singularité, de se distinguer de tout autre, d'avoir son libre arbitre, de pouvoir faire des choix, et donc de pouvoir être un être démocratique, un citoyen qui a un rôle dans la vie collective. Il y a aujourd'hui le danger de supprimer cette conscience, de supprimer cette dimension, parce qu'aujourd'hui le capitalisme a besoin de contrôler les comportements. Pour contrôler les comportements, il a développé des techniques de captation du désir, de massification de ce désir. Cette massification du désir a abouti progressivement à une destruction du désir parce que c'est une destruction de la singularité. Or sans singularité il ne peut pas y avoir de désir et du coup on arrive à ce que j'appelle aujourd'hui un capitalisme pulsionnel, à une télévision pulsionnelle, et même à une politique pulsionnelle. Nous voyons bien qu'en ce moment ce qui constitue le fond des débats politiques, c'est de la pulsion.

    Au moment où nous avons plus que jamais besoin d'intelligence. Les énormes besoin que rencontre la planète : les problèmes climatiques, la pollution, les problèmes démographiques, les questions de santé dans le Sud, en particulier en Afrique, la maladie mentale qui progresse à toute vitesse dans nos pays, le désarmement psychique des enfants et des adolescents (qui ne reconnaissent plus leurs parents comme parents, qui ne reconnaissent donc plus les flics non plus, qui ne reconnaissent plus rien) c'est nous qui sécrétons toute cette situation.

    C'est la domination d'une bêtise organisée par l'exploitation de technologies qui devraient être et qui pourraient être au service de l'élévation. Aujourd'hui on ne peut lutter contre les ravages de toutes ces technologies de contrôles. On parle beaucoup de la télévision mais il y a tout ce qui s'annonce demain avec les micro-technologies et après-demain avec les nano-technologies qui sont des technologies d'une efficience extraordinairement grandes. Ces ravages-là, qui pourraient devenir encore bien plus grands que ceux que l'on connaît, la seule solution pour lutter contre eux c'est de s'approprier ces technologies."

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  • Voici la présentation de l'ouvrage de Bernard Stiegler La télécratie contre la démocratie, Flammarion, octobre 2006:

    "La télécratie qui règne désormais en France comme dans la plupart des pays industriels ruine la démocratie : elle remplace l'opinion publique par les audiences, court-circuite les appareils politiques et détruit la citoyenneté. La télévision et l'appareillage technologique qui la prolonge à travers les réseaux numériques de télécommunication sont en cela devenus le premier enjeu politique. De ces effets ruineux de la télécratie, qui transforment la vie quotidienne dans ses aspects les plus intimes, les candidats au scrutin présidentiel de 2007 ne disent pas un mot : ils ont été produits par ce système. Car à travers ce que l'on appelle les industries de programmes, c'est la relation politique elle-même qui est devenue un nouveau marché, et ce marketing confine aujourd'hui à la misère politique : au cours de la dernière décennie, l'appareil télécratique a développé un populisme industriel qui engendre à droite comme à gauche une politique pulsionnelle, et qui semble conduire inéluctablement au pire. Ce devenir infernal n'est pourtant pas une fatalité. La philosophie se constitua à son origine même contre la sophistique : celle-ci, par une appropriation abusive de l'écriture, développait une gangrène qui menaçait de guerre civile la cité athénienne. De cette lutte contre les tendances démagogiques de la démocratie grecque résultèrent les formes de savoirs qui caractérisent l'Occident. Prônant un nouveau modèle de civilisation industrielle, cet ouvrage affirme qu'un sursaut démocratique contre les abus de la télécratie est possible, et appelle l'opinion publique française et européenne à se mobiliser contre la dictature des audiences."


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  • Certains les haïssent, d'autres s'en moquent, la plupart les ignorent. Les adeptes de la "décroissance", eux, en rient. Leur mode de vie, c'est le vélo, la nourriture bio et la cuisine sans frigo. Un quotidien frugal, mais heureux, disent-ils : pour préserver l'environnement. Pour les "décroissants", la société telle qu'elle fonctionne n'a pas d'avenir. Le réchauffement climatique, l'épuisement des ressources pétrolières en sont les symptômes. La faute au capitalisme et à son idéologie de la croissance, estiment-ils. Pour en sortir, une solution : le retour aux sources. Dans le monde idéal des décroissants, toute l'économie devrait être "relocalisée". La mondialisation des échanges n'a plus lieu d'être, on vit à l'échelle de l'"éco-région". La consommation de tomates d'Espagne ou de lave-vaisselle polonais est interdite. On achète près de chez soi des biens produits près de chez soi. On se débarrasse de sa voiture, on jette sa télévision et on chauffe à 18 °C. On travaille, enfin, si possible, près de son domicile, on évite de prendre l'avion et, pour les vacances, c'est toute la famille en TER. La théorie de la décroissance, en France, doit son essor à l'activisme, depuis 2001, des fondateurs du mouvement Casseurs de pub : Bruno Clémentin et Vincent Cheynet. Aujourd'hui, aucune statistique ne recense le nombre de sympathisants du mouvement. Mais une dizaine d'intellectuels promeuvent régulièrement leurs idées. Parmi eux : l'ancien journaliste Jean-Paul Besset, coordinateur de Pour un pacte écologique de Nicolas Hulot, et le peintre et écrivain Jean-Claude Besson-Girard. Il existe aussi un mensuel - La Décroissance - et une revue pluriannuelle : Entropia. Les décroissants manquent cependant de relais politiques. En 2002, un militant, Pierre Rabhi, avait tenté d'être candidat à l'élection présidentielle, mais il n'avait pas obtenu les 500 parrainages nécessaires. Au mois d'avril, les décroissants ont également tenté de créer un Parti pour la décroissance (PPLD). Il est mort-né. Aujourd'hui, seul le député Vert Yves Cochet se fait régulièrement le porte-parole des thèses du mouvement. C'est que les décroissants, radicaux comme modérés, ont un ennemi de taille : le développement durable. "Une imposture", selon Serge Latouche, professeur à l'université Paris-Sud (Orsay) et l'un des rares promoteurs universitaires du mouvement. "Sous les habits neufs du développement, on retrouve la croissance dans toute sa nudité", explique-t-il dans Le Pari de la décroissance (Fayard, 2006). La multiplication d'appareils économiseurs d'énergie, l'essor des biocarburants ou l'amélioration des TGV sont, pour lui, de dangereux miroirs aux alouettes. La faute à un effet "rebond" qui, paradoxalement, inciterait à acheter plus, à rouler plus et à voyager plus. Cette radicalité nuit au mouvement. Certaines thèses, comme la limitation des naissances ou le retour à la spiritualité, également développées par quelques décroissants, séduisent des milieux très réactionnaires. Jean Jacob, auteur de L'Antimondialisation (Berg International, 2006), a ainsi enquêté sur les liens qu'entretiennent certains décroissants avec des mouvements d'extrême droite. "Nous souffrons d'une extrême faiblesse théorique qui nous empêche encore de penser le monde globalement", remarquait récemment Paul Ariès, l'un des théoriciens, plutôt modéré, de la décroissance. Elise Vincent Article paru dans l'édition du 02.12.06 http://www.lemonde.fr/

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  • Une étude des Nations unies sur le patrimoine des ménages confirme le gigantesque écart entre les niveaux de vie sur la planète. Selon ce document, publié mardi 5 décembre, 2 % de l'humanité concentre 50 % du patrimoine de la planète, alors que la moitié de la population mondiale n'en détient que 1 %. "Cette étude montre que les inégalités de patrimoine sont encore plus grandes que les inégalités de revenus", a souligné, mardi, le directeur de l'Institut mondial de recherche sur l'économie du développement de l'université des Nations unies. Pour réaliser cette enquête, la plus exhaustive jamais réalisée sur le patrimoine des particuliers, les chercheurs ont fait la somme des actifs de chaque individu adulte moins ses dettes, en tenant compte des taux de change et du pouvoir d'achat. Les revenus ne sont pas pris en compte. 500 000 DOLLARS POUR LE 1 % DES PLUS RICHES Le document de l'ONU indique qu'un patrimoine personnel de 2 200 dollars (1 650 euros) ou plus permet de faire partie des 50 % des personnes les plus riches au monde. Il faut posséder 61 000 dollars (45 758 euros) pour compter parmi les 10 % des personnes les mieux dotées, et 500 000 dollars (375 065 euros) pour accéder au club très fermé du 1 % des individus les plus fortunés. L'étude confirme également la concentration de la richesse dans les pays les plus développés, le quart des 10 % des personnes les plus riches vivant aux Etats-Unis. Arrivent ensuite le Japon, l'Allemagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, la France et l'Espagne. Au total, l'Amérique du Nord, l'Europe et les pays à hauts revenus d'Asie-Pacifique possèdent 90 % des biens mondiaux. Enfin, la concentration du patrimoine à l'intérieur d'un même pays est également très forte. "La part de richesse détenue par les 10 % les plus riches s'échelonne d'environ 40 % en Chine à 70 % aux Etats-Unis", précise l'étude. En 2000, année de référence de l'étude, 499 personnes dans le monde étaient milliardaires en dollars, et 13 millions étaient millionnaires. www.lemonde.fr

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  • Voilà ce qu'aurait pu dire Dominique Voynet au soir du premier tour. Grâce à Nicolas Hulot, les candidats, après avoir signé le pacte écologique, se sont drapés de vertes intentions...Même le plus libéral et le plus productiviste d'entre eux, Sarkozy, a signé. Ce qui prouve l'absurdité de ce pacte!

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